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Du recul sur une superproduction

État des lieux

La diffusion de la 4e saison des Archives de l’Insondable a débutée le 1er avril1 et se poursuit en ce moment, à raison d’une Archive proprement dite toutes les semaines et d’un épisode du feuilleton tous les 15 jours.

Cette saison, en particulier, s’apparente pour nous, pauvres amateurs éparpillés, à une superproduction. Que ce soit pour le script, co-écrit sur des semaines par Olivier et moi-même et qui a donné un document de travail de près de 70 pages, que ce soit sur l’ampleur du récit lui-même, faisant intervenir une quinzaine de personnages2, ou que ce soit par son casting trois étoiles, l’ensemble du projet n’a pas été une mince affaire à monter.

Dans ce dossier, l’intégralité des voix de cette saisonDans ce dossier, l’intégralité des voix de cette saison

J’aurais aimé pouvoir entrer en production beaucoup plus tôt, de manière à ce que tout soit prêt à diffuser à la fin du mois de mars, mais le planning d’enregistrement de chacun étant ce qu’il est, et mes propres horaires de travail à côté3 ont fait qu’en fait, le premier épisode n’a pu être terminé et passé en PàD4 que quelques jours avant sa date de diffusion.

Je ne travaille pas en flux tendu, fort heureusement. Bien au contraire, ma marge de sécurité tend à s’agrandir, au grand plaisir de mes nerfs. D’autant plus que, pour cette saison, nous avons convenus, Dimitri et moi, de nous répartir le travail. Alors que j’avais assumé l’intégralité des montages audio ; feuilletons et brèves des Archives, pour les saisons 2 et 3, Dimitri m’a proposé de prendre à sa charge les montages des PFE, me libérant pour que je m’occupe exclusivement du Feuilleton.

C’est tout bénéfice, car, à quelques exceptions près, il peut gérer la production intégrale de son côté ; enregistrement de voix, synthèse vocale de Renée et montage/mixage.

Une formule qui s’avère, pour le moment, très satisfaisante et confortable.

Je me demande si c’est bien ?

Et c’est une véritable interrogation que je me pose consciemment depuis que je viens de boucler, cet après-midi, le montage de l’épisode 3 et du minizode5 qui le suit.

Nous avons mis des mois à écrire les dialogues et les situations de ce feuilleton, et on ne s’est jamais caché qu’on s’était franchement bien marrés à l’écrire, Olivier et moi. Sans modestie aucune, nous en sommes fiers, et rien que d’avoir profité de ces moments d’échanges débridés pour pondre ce récit farfelu, j’en suis satisfait.

Ma propre copie de travailMa propre copie de travail

Étonnamment, lorsque j’ai enregistré mes parties de dialogues, je n’avais plus cette sensation satisfaisante de savoir que j’avais un texte rigolo et que la version audio serait elle aussi rigolote. Je ne pensais à rien d’autre qu’à jouer mon texte comme il faut sans faire trop d’erreurs.

Quand j’ai récupéré les autres voix, je n’ai pas vraiment imaginé le résultat monté, je me suis juste contenté de vérifier que c’était propre, montable. Je me suis à peine donné le plaisir d’écouter quasi in extenso le rush fourni par Natasha Triou, d’abord parce que sa voix est un bonbon, et surtout je voulais entendre une réplique dont je suis particulièrement fier6. Mais, là encore, pas de fun.

Depuis fin mars, je monte chaque épisode de ce feuilleton. Alors même que j’ai sous les yeux sous les doigts et dans les oreilles, le récit, l’histoire qui se construit petit à petit, qui commence à prendre forme et à se dérouler, je n’ai toujours pas la sensation que ça marche, que c’est drôle.

C’est en grande partie dû au fait que cette étape est essentiellement technique.

Certes, j’entends maintenant la succession des dialogues avec les voix de chaque personnage, mais tout se met en place couche après couche, élément après élément.

Le montage de l’épisode 3 dans le logiciel ReaperLe montage de l’épisode 3 dans le logiciel Reaper

En général, je suis toujours le même ordre :

  • Je pose d’abord le rush de chaque personnage intervenant dans l’épisode
  • Ensuite, je découpe les répliques et je les espace pour reconstituer l’ordre des échanges entre personnages
  • Puis, je rythme ces dialogues ; gommer des pauses superflues, ou au contraire en rajouter quand c’est pertinent, gérer les coupages de paroles, les chevauchements, etc.
  • J’ajoute ensuite les ambiances sonores, les fonds tels qu’une ambiance de bureaux, le bourdonnement d’une clim, des bruits lointains de circulation, etc.
  • Ensuite, je rajoute les bruitages ponctuels ; ouverture d’enveloppe, bruits de pas, applaudissements, ect.
  • En dernier, j’ajoute et je cale d’éventuelles pistes musicales (en plus des jingles d’intro et d’outro)
  • La toute dernière étape7 consiste en une repasse de polissage, pour affiner les rythmes des enchaînements et les quelques cheveux à couper en multiples de deux

D’une manière générale, j’en ai pour une petite journée de travail. Pour l’épisode 3 il m’a fallu un peu plus de temps du fait que c’était le premier à faire intervenir autant de personnages en même temps8. Mais j’ai immédiatement enchainé sur le montage du minizode.

Le contenu du minizode est plus simple. Il s’agit juste d’un dialogue entre deux personnages seulement, qui est censé se dérouler quelques minutes après la fin de l’épisode précédent. C’est une sorte de débriefing improvisé. Ils ont d’ailleurs été ajoutés après que la trame générale ait été bouclée, même si –nous ne sommes pas à un paradoxe près9, mais nous les assumons complètement– l’un de ces minizodes contient un élément déclencheur pour la suite de l’histoire10.

Donc, tout ça pour dire, là encore, je n’ai aucune notion du fun, du lol, du mdr que notre production peut générer.

Non, c’est un bon moment après, que je me rends compte de la chose. Pour être précis, quelques heures après.

Car, lorsque j’ai fini le premier montage, une copie de l’épisode est mise à disposition de mes deux autres malfaiteurs pour avoir leurs avis, conseils, suggestions, insultes ou simplement leur « trop cool ça claque ptdr :poucelevé: ».

Une fois que l’épisode est validé par le conseil d’administration, la version finale du fichier est déposée dans le répertoire Archives Saison 4 – PàD, je mets le Trello à jour, je sauve tout, je ferme tous les logiciels et je fais strictement autre chose ; vaisselle, pliage de linge, gratouillis d’oreilles aux toutous, ou quelques minutes d’un jeu débile et sans intérêt.

Et, passé ce délai de carence, j’y reviens. J’essaye de me mettre dans le rôle de l’auditeur, je m’efforce d’oublier que j’ai partiellement écrit ces lignes, que j’ai joué dedans, et que j’ai monté l’ensemble.

Le résultat, sur cette saison 4 est mitigée. Bizarrement, sur les épisodes précédents, quelques passages m’ont vraiment plu (les annonces du métro, la présence de Thomas Crayon…) mais globalement ça reste une montée vers l’histoire elle-même. J’ignore si c’est dû à l’écriture ou le montage qui manque de pêche, mais même si j’en suis satisfait, mon ressenti reste moyen, un peu vague.

Et puis, hier, j’ai bouclé les deux épisodes 311, et j’ai attendu que le soufflet retombe pour les écouter.

Et ça a marché. Je me suis marré. Je me suis régalé du « — Youhou ! — La ferme Corlaix ! », j’ai adoré les hésitations de Dimitri lorsqu’il se rend compte que de parler des Archives et des Archives n’a aucun sens, j’ai applaudi12 la tirade de Gechter, culminant par sa description de la mangrove où il a pêché un poulpe.

Bref, à ce point j’abandonne toute modestie, et je le dis le menton haut et poilu, le regard fier et flou13, la voix assurée, bien qu’empruntée à Jean-Paul Rouve : P’tain mais oui ! Ce qu’on a fait est bon ! De l’écriture au montage en passant par nos super acteurs, on a un truc qui marche, bourdayle !

J’avais de petits soucis de motivation jusque là. Il me manquait la pêche, l’enthousiasme des saisons précédentes. Là, ce cap maintenant passé, je l’ai retrouvé.

Et, c’est cool.


Pour rappel :



  1. Une coutume à laquelle nous tenons, même si parfois ça nous oblige un peu à cruncher, comme cette année.↩︎

  2. Un record, en ce qui nous concerne.↩︎

  3. Sans compter les autres productions ; la SVTLC et le Festival d’Aix…↩︎

  4. Prêt à Diffuser. Un jargon de la prod audiovisuelle qui signifie simplement que l’épisode a été validé.↩︎

  5. Mot-tiroir venant de la contraction de mini-épisode. C’est pas très beau, mais c’est rigolo, comme terme.↩︎

  6. Il faut que je demande à Olivier ce qu’elle en a elle-même pensé…↩︎

  7. Qui peut s’avérer la plus longue parfois.↩︎

  8. Mais ce ne sera pas celui qui en comptera le plus au final. Wait’n see.↩︎

  9. C’est un peu notre marque de fabrique, après tout.↩︎

  10. Je prends mille précautions pour ne rien divulgâcher. J’espère que vous appréciez l’effort.↩︎

  11. On va dire ça comme ça, tiens, histoire de rajouter un peu d’absurde encore.↩︎

  12. Intérieurement. Je ne suis pas si volubile, mais j’ai un sens marqué de l’exagération.↩︎

  13. Il faut que je passe une lingette sur mes lunettes.↩︎

Dans les épisodes précédents… Lettre ouverte à la régie de bus d’Aix-en-Provence À moi l’Oscar !
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